Car contrairement à ce que beaucoup s’imaginent sans jamais l’avoir ouvert, Charlie Hebdo n’est pas un journal de “blagues”. L’humour est un moyen, pas un but. Un moyen pour emmener le lecteur là où il n’aurait pas eu l’idée d’aller seul. “Peut-on rire de tout ?” est une question stupide. On ne peut pas rire de “tout” pour une raison simple : qui peut prétendre connaître “tout” pour ensuite décider d’en rire. A part Dieu puisqu’il est le créateur de “tout” ? Lui seul est donc capable de rire de “tout”. Mais quand on constate à quel point les religions exècrent le rire, l’existence de Dieu redevient, une fois encore, une hypothèse bien fragile.
Finalement, on ne rit que du peu que l’on connaît et même du très peu que l’on comprend. Par essence, rien n’est drôle dans la vie. Une banane, ce n’est pas drôle. Un piano, ce n’est pas drôle.
Provoquer le rire est avant tout un choix, pas une performance. Un choix toujours politique qui implique qu’on n’ait pas envie de faire rire systématiquement avec tout. Car les dessinateurs de Charlie ne sont pas des robots programmés pour faire s’esclaffer à n’importe quel prix la foule abrutie qui veut rigoler de tout sans jamais réfléchir à rien. Rire, c’est d’abord réfléchir. Ceux qui n’ont pas compris ça ne comprendront jamais rien à Charlie Hebdo.
Riss, Une minute quarante-neuf secondes, 2019
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